Isabelle Huppert dans le rôle d'Orlando,
1993, adaption de Bob Wilson ,
Théâtre de l'Odéon - Paris -
" L'esprit
exécute de folles cabrioles
et gambades quand il déborde ainsi de
la
soucoupe ." !
Oui et c'est un
bonheur !
Que passent les
jours et les siècles, que passent les
royaumes, les empires, que
passent toutes les modes
mêmes celles des guerres , et celles des
sexes mais
que vive la création !
Orlando, c'est un
hymne à la vie, à la littérature, à la poésie.
Le temps ne passe
plus pour Orlando. Pas réellement.
Mais il passe vraiment !
« Le temps
passa » c'est comme écrire :
« il n'arriva rien du
tout ».
Alors elle écrit,
il écrit,
...écrire !
Virginia Woolf.
Orlando: A Biography.
New York: Crosby Gaige, 1928.
Et peu importe
l'heure à laquelle nous arriverons !
Prenons toutes les routes
,
seul nous contera la vérité de l'acte !
« Et comme le
jour était bref et que le jour était tout... »
L'enfant maladroit
et solitaire, heureux et poète, amoureux
fou continue de vivre.
Oublie-t-il d'en
mourir ?
En vérité, il lui faut écrire alors il écrit .
Orlando c'est la
nuit qui s'éclaire ,
c'est les flammes d'un esprit qui illuminent un
monde.
Orlando c'est la
liberté.
La joie, l'innocence du génie, la folie.
La beauté,
l'intelligence aussi .
Cet extrême
sentiment qui nous est donné de vivre.
« car le
philosophe a raison de dire qu'il ne faut rien de plus
épais que la
lame d'un couteau pour séparer le bonheur de la
mélancolie. »
Tellement fort que
tout « après » semble déjà voué
à une poussière
misérable.
Tellement fort que
le temps ne signifie plus,
que la raison transperce le coeur et
l'âme,
Tellement fort que l'espace et le temps sont un
Royaume.
L'écriture de
Virginia Woolf touche au génie.
Sa plume se fait tour à tour
fleuret, scalpel , caresse,
souffle ou vol d'oiseau.
Elle nous conte,
elle nous confie, elle nous interroge.
Elle nous secoue, nous
transporte. Nous chahute.
Trois cent ans
passent si vite en son extrême compagnie.
« Le doigt de
la mort doit nous toucher pour rendre
supportable le chaos de la
vie…. »
Et si jamais la mort ne
nous atteint pas…. ?
Et si nous vivons encore,
...toujours, si
fort, tellement…
Vivre toutes ses
formes, extrêmement.
Doit on marcher sur
les bords de la Serpentine
pour garder le reflet d'un visage ?..
Comment oublier la nuit ?
Comment rêver ? ne pas sombrer
Comment ne
jamais se réveiller ?
Orlando est liberté.
Fragile parfois, invulnérable, parce qu'elle est ce qu'il vit, et
elle vit ce qu'il est. Il ne dort pas, elle vit.
« La société
est est tout et elle n'est rien . C'est la concoction
la plus
puissante du monde et la société n'a pas la moindre
réalité.
Seuls les poètes et les romanciers peuvent traiter
avec de tels
monstres ».
Et c'est un bonheur
que de lire le sort qu'a réservé Virginia
Woolf à ces monstres.
Avec art, avec
humour, avec lucidité, avec force, avec
fantaisie, avec poésie,
avec courage , avec témérité, avec
avec amour, avec tendresse, avec génie.
« Pudeur,
Pureté et chasteté » pourront
toujours tenter de
faire taire les trompettes de la vérité...
Elles peuvent
toujours s'écrier :
«
Les temps ont changé :
les hommes ne veulent plus de
nous et les femmes nous détestent.
Nous partons, nous
partons. ! »
« Moi
( c'est pureté qui parle) pour le perchoir du poulailler,
moi (
c’est
chasteté) pour les hauteurs encore inviolées du
Surey ; moi (
c'est Pudeur) pour n’importe
quel recoin
aimable, bien pourvu en lierre
et en rideaux.
Car
c’est
là-bas et non pas ici (toutes parlent ensemble,
en se prenant la
main et en faisant des gestes d'adieu
désespérés
en direction du lit où gît
Orlando
endormi) que
résident encore, aux
fonds des nids et
des boudoirs, les
bureaux et les tribunaux, ceux qui nous aiment
encore, ceux
qui nous honorent :
vierges
et hommes d'affaires, hommes
de loi et docteurs, ceux qui interdisent
et qui réfutent ;
ceux
qui vénèrent sans savoir pourquoi et ceux qui approuvent
sans
comprendre ; la tribu encore nombreuse ( le ciel soit
loué) ...des
gens respectables.
Qui préfèrent ne pas voir, qui désirent ne pas
savoir,
qui aiment l'obscurité et nous adorent encore,
non sans
raison : car c'est nous qui leur avons
donné
Richesse, Prospérité, Confort.
Vers eux nous allons, et nous
vous laissons.
Venez mes sœurs, venez !
Ce lieu n'est pas pour nous. »
« Elles
se retirent en grande hâte, rabattant leurs draperies
sur leur tête,
comme pour se préserver de quelque chose
qu'elles n'osent pas
regarder, et elles referment la porte
après elles.
Nous
restons donc entièrement seuls dans la pièce avec
Orlando endormi,
et les trompettes.
Celles
ci se rangent cote à cote en bon ordre, et d'un seul
souffle
décuplé, elles exigent :
« La
Vérité ! »
Et
là dessus Orlando s'éveille
Il
s'étire, il se lève.Il apparaît totalement nu à nos yeux et
tandis que les trompettes clament « la Vérité ! »
« La Vérité ! »
force nous est de l'avouer :
il est
devenu femme. »
Oui
les vieilles rombières Pudeur, pureté et Chasteté
pourront toujours s'écrier...
Virginia
quant à elle nous écrira toujours.
« Et comme le
jour était bref et que le jour était tout... »
"Orlando", film de
Sally Potter 1992
Tilda Swinton dans le rôle d'Orlando.
Orlando de Virginia Woolf
libre de poche
Traduction:
Catherine Pappo- Musard
ISBN 9782253029830
Astrid Shriqui Garain , lecture .
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