mercredi 4 juillet 2018

d'un bonheur absolu


Photographie © Nicola Davison Reed

 Je te parlerai de ces moments noirs où la vie quittait ma table
et de ce mauvais vin que je versais dessus mes larmes. 

Je te parlerai de tant d' absences
qu'entre leurs mains s'effacera mon visage.

Je te dirai avoir tout perdu
mais il est vrai que tout ne tient à rien
quand on a rien connu.

Je te dirai comment je suis revenu
tremblant de parole comme du geste.
Oui je te parlerai,
De moi, et pas d'un autre
tant il vrai qu'on ne peut toucher quelqu'un
qu'à la hauteur de ce qu'on est soi même.

Je te parlerai d'un roman noir
dans lequel une nuit a renversé la table
et qui de trois points de suspension
a dézingué ma ligne d'horizon.

Car il est vrai que rien ne rime avec rien
puisque personne n'en connaît la fin.

Et puis je te parlerai, à toi ,
toi qui viens à cette table
qui me jettes deux sous de larmes
en me disant ce n'est rien.

Mais il est vrai que rien peut nous servir à tout
tant qu'on a rien vécu.

Ou alors, je parlerai peut être beaucoup
afin de ne rien dire de trop surtout
car il est vrai que tout cela peut nous mener à tout.

 
Astrid Shriqui Garain, «  d'un bonheur absolu » , VII 2018 




une mer de rubis

"La mer rouge" 



On dit que la mer devient rubis lorsque le ciel souffle sur la nuit,
et que L'Amour est un tambour qui frappe sa parole dans nos choix.

On dit qu'il voyage de beau séjour et que chacun
se doit d’élever sa voie dans l'esprit de ses lois.

Mais on voit :
le Naufrage, et la Nuit, en silence,
planter ses pas dans le cuir des mots,
et cette peur et cette haine nous couler à flots.

On ne voit pas
que le poids de nos détresses
dresse une à une nos pierres à élever la bassesse de nos murs.

On voit que la terre devient poussière lorsque la nuit éteint le ciel,
mais on dit aussi que jusqu'au dernier grain du soleil
il est possible de conter la Vie toujours plus haut .

La fragilité est force et non faiblesse.
Protège, n'ensevelis pas.

Arrache de toi de cette armure , qui te sert tant de foi,
à repousser cet autre qui peut être toi.

Accepte les brèches possibles de ta chair.
Accepte d'écrire d'autres possibles fois.
Prends le risque de la caresse de ce que tu ne connais pas.

Hâte toi de presser ton coeur en éclats :
plus fine sera sa peau, plus loin portera ses mots.
L'Amour est un tambour, il est ton rythme.
Ne l'oublie pas.

Une histoire s'achève ici,
et notre mémoire commence de là.

On dit que l'Esprit nous entrera dans la peau
lorsque qu'un bonjour nous traversera la tête.
Alors, la mer sera de rubis et la terre sera de soleil
et nous serons, qui sait, amis, d'ici ou de là-bas,
peut être toujours de bien et encore de si beaux.

Astrid Shriqui Garain, « Une mer de rubis ». VII-2018


lundi 2 juillet 2018

Il sera dit



Les trois âges de la femme - Gustav Klimt.


"Je vivrai si longtemps,
si longtemps, que l'étoile parlera de la terre
et que la terre portera sa lumière.

Je vivrai si longtemps qu'aucun crime n'aura l'usage de nous faire taire.

je vivrai si longtemps,
si longtemps qu' à chaque heure première il sera dit le nom de la dernière.

je vivrai si longtemps,
si longtemps que mon regard embrassera ton visage
et que nos actes inventeront le possible d'un village.

Je vivrai si fort
que toute vie sera imprescriptible
et que la mort ne pourra rien y faire.

Je vivrai si longtemps
que nos portes resteront grandes ouvertes
Et que dans notre mémoire entrera chacun de nous.

Je vivrai tant et, si bien
aussi longtemps
qu'à la nuit nous ferons regretter le jour
et que devant chaque nouveau jour nous garderons Espoir.

Je vivrai aussi longtemps
que sur aucune mer,
dans aucun désert
sur aucune route
sous aucune pierre,
derrière aucun mur,
dans aucun poème et aucune prière
nous ne lâcherons la main d'aucun enfant de la terre.

Aussi longtemps
qu'enfin, ayant chassé le silence et les bruits
nous puissions toucher de notre chair
l'immense capacité de nos vies.

Je vivrai si longtemps
si longtemps que la lumière ne cessera jamais de tourner au tour de la terre
et que cette joie saura porter la plus belle lettre de notre histoire.

Je vivrai si longtemps
que la chance ne laissera plus rien ni personne au hasard

Je vivrai ,
hier, demain et, chaque aujourd'hui,

Aussi longtemps qu'à chacun de nous, désarmés par l'Amour,
il sera dit la puissance de la vie.

Si longtemps, tant et si bien,
au nom de tous, enfin, il est écrit :
il sera dit. "


Astrid Shriqui Garain, « il sera dit », VII 2018