vendredi 29 décembre 2017

Passer, quoi qu'il en coûte





PASSER, QUOI QU'IL EN COÛTE 

Georges Didi-Huberman, Niki Giannari - 2017


Des Spectres hantent l'Europe

http://www.survivance.net/document/30/58/Des-spectres-hantent-l-Europe

Maria Kourkouta & Niki Giannari // France // 2016
// 99 min // Couleur // 1,85:1

 Ils passent et ils nous pensent.
Les morts que nous avons oubliés,
les engagements que nous avons pris et les promesses,
les idées que nous avons aimées,
les révolutions que nous avons faites,
les sacrements que nous avons niés,
tout cela est revenu avec eux.
Où que tu regardes dans les rues
ou les avenues de l'Occident,
ils cheminent : cette procession sacrée
nous regarde et nous traverse.
Maintenant silence.
Que tout s'arrête.
Ils passent.
Niki Giannari 

 Avec un désir
que rien ne peut vaincre
ni l'exil, ni l'enfermement, ni la mort.
Orphelins, épuisés,
ayant faim, ayant soif,
désobeissants et têtus,
séculaires et sacrés
sont arrivés
en défaisant les nations et les bureaucraties.
Se posent ici,
attendent et ne demandent rien
seulement passer.
Niki Giannari.

 Tous ces mouvements de migration ont un nom générique : la culture.Non pas la culture des "émissions culturelles" ou des " ministères de la culture", mais la culture au sens anthropologique du terme, à savoir ce qui fait des humains ces êtres capables, non seulement de parler, de travailler ou d'inventer des outils, voire des œuvres d'art, mais encore de vivre en société, de se parler, de s'inventer, de s'imaginer les uns les autres. Lorsqu'une société se met à confondre son voisin avec l'ennemi, ou bien l'étranger avec le danger, lorsqu'elle invente des institutions pour mettre en œuvre cette confusion paranoïaque , alors on peut dire, en toute logique historique - et non pas selon un simple point de vue éthique- qu'elle est entrain de perdre sa culture, sa propre capacité de civilisation. " Georges Didi-Huberman - p 62



L'enfance actualise la survie et l'héritage du genre humain; mais elle potentialise aussi - donne puisance à - son avenir même. C'esr surtout cela que je vois, pour finir, dans le film "Des spectres hantent l'Europe" : je vois des enfants partout.
Je les vois, tous petits, faisant la queue dans la boue, vêtus de ces imperméables blancs trop grands pour eux et qui leur donnent, plus qu'aux adultes , cette touche spectrale et cependant si vivace. Je sais q'ils sont parmi les plus atteints, les plus vulnérables, les plus survivants parmi tant d'autres enfants morts en mer ou dans la guerre.Mais je les vois sourire, chanter,jouer avec rien, inventeurs d'un avenir surgi de la plus grande pauvreté." Georges Didi -Huberman p 85


 Des spectres hantent l'Europe ? Oui Monsieur, et c'est même ce qui pouvait arriver de mieux à l'Europe.Rappelez-vous que Derrida écrivait dans Spectres de Mars au sujet de ce paradoxe de la survivance : " Un revenant étant toujours appelé à venir et à revenir, la pensée du spectre, contrairement à ce que l'on croit, fait signe vers l'avenir. C'est une pensée du passé, un héritage qui ne peut venir que de ce qui n'est pas encore arrivé - de l'arrivant même." Rappelez-vous ce que Pasolini faisait de le " force du passé" une chose " plus moderne que les modernes".
Georges Didi-Huberman -p 85


Sur les 185 espèces de primates subsistantes, seul l'homme a un comportement migrateur. Homo sapiens n'est autre, pour finir, qu'un remarquable homo migrans. Vouloir l'oublier - le refouler, le haïr - c'est simplement s'enfermer dans les remparts de la crétinisation. Mieux vaut entendre la leçon de " ceux qui savent encore être en mouvement".
Georges Didi-Huberman - 5-14.03.2017 
 
 En cela ils sont "nos spectres" : notre propre hantise autant que notre propre destination.
Georges Didi-Huberman - p68
 


A l'orée de notre histoire de l'art, Pline l'Ancien avait déjà établi une rigoureuse distinction concernant le monde des images : une antinomie entre "luxure" ( luxuria) et "dignité " ( dignitas). La luxure concernait, selon lui, tout un commerce de l'art fondé sur "le prix" et sur l’indistinction des usages comme des temporalités : ce qui se passait, par exemple, lorsqu'un patricien romain faisait l'acquisition d'une statue grecque d'Apollon, soit une oeuvre soustraite au territoire colonisé de l'empire, puis lui faisait couper la tête pour y placer, de façon aussi artificielle que prétentieuse, son propre portrait...Tout cela qui pourrait aisément évoquer une économie caractéristique de notre actuel régime esthétique de l'âge post-moderne, lui aussi dominé par le marché, le kitsch et l'arrogance bourgeoise." Georges Didi-Huberman - p 82 

 "Tout a un prix ou bien une dignité. Ce qui a un prix peut-être aussi bien remplacé par quelque chose d'autre, à titre équivalent; au contraire, ce qui est supérieur à tout prix, ce qui par suite n'admet pas d'équivalent, c'est ce qui a une dignité."
Emmanuel Kant. 





mardi 12 décembre 2017

Les libellules




Des organiques - 20 
Astrid Shriqui Garain 



 "On a tellement dit que nous n'apprenions rien d'une image, alors qu'au contraire nous n'apprenons rien que sur les images que nous sommes capables d'engendrer, precisément pour comprendre". 

'L'essence de la poésie se lit dans ce que dévoile une libellule photographiée : l'étrangeté d'un monde entièrement inventé"

" la visibilité du monde est différentielle"

"Tout être vivant s'inscrit dans le monde comme être d'action, de proposition, d'anticipation - on oserait dire d'invention."

" il y a un autre monde, inouï , qui se déploie, visible grâce aux énormes yeux à facettes à peu près sous 360 degrés dans tous les plans possibles". 

                              Alain Cugno -La libellule et le philosophe ", extraits.

 Photo A.S - Presqu'île de Ruys - 2014

mercredi 6 décembre 2017

Rencontre I

 



Rencontre I 

Leonor Fini (1907-1996)  /  Joos de Momper le Jeune ( 1564 - 1535 ) 
Linogravure sur papier Chiffon 
Astrid Shriqui Garain  


   Oeuvre de Léonor Fini





tableaux de Joss de Momper 




Léonor Fini - photographie d'André Ostier 1949 



Leonor Fini au Monastère de Nonza, Corse, 1965, photographie d'Eddy Brofferio