dimanche 15 mai 2016

Le monologue, Louis Calaferte




ISBN : 2070743926 - Gencode : 9782070743926


 « Pourtant il faut survivre »,..
                                            « Pourtant nous avons besoin du bonheur », 
 alors,
 « il faut voler quelques minutes au malheur », puisque ...
                                                                                « L'essentiel est cependant de vivre »
« Serait il concevable de pleurer dans le lit d'une femme aimée ? » 
alors aimer en corps, aimer sentir le souffle, comprendre le langage de ces larmes, des fleurs déposées, devant l'océan se savoir seul naufragé. 
« Personne n 'écoute »,...« personne n'a pitié »...
le monde est une araignée noire qui flotte à la surface troublante des jours de nos semaines, bruit de cuisine, amoncèlement des gestes répétés, oubliés, fatigue du quotidien et pourtant instant d'une beauté simple et sidérante.
Mots en cascades, un inventaire de soi et de tout autre, un miracle d'être en vie à l'hiver du monde.
Sept ans de deuil et s'étonner de se voir tenir tout entier dans la paume du ciel, se réveiller en solitude, fuir le cauchemar des hommes, tâter, palper le monde le prendre contre soi entre la peau et le crépi des murs.
Contraste des lignes, entrechoquement et chevauchement des bruits, des murmures de la rue , des cafés, respirer, gouter. 
Appeler.. l'enfance, chasser la désespérance du sexe, redouter le désespoir des corps, le meurtre seconde , l'abandon, l'étroitesse des pas, l'achèvement, l'inaccomplissement. 
Vivre au jour.
Revenir soudain à la beauté inconnue , à  la beauté de nos désordres qui heurtent la lassitude de nos espaces. de la pulpe pensée en un corps sage, de l'oeuf à la page, du sein au rebord de sa cage. le goût de monde tient tout entier dans notre plat. 
L’œuf déposé. 
L'ovale fécondé. 
Et voilà que « le morceau de pain crève l'oeil solaire ». 
Incrustations vibrantes du vivant dans l'inconcevable réalité du temps. 
Tailleur, orfèvre, ravaudeur du temps présent. Tout fait acte, don, douleur et mise en pièce. Inventaire de la nos frénétiques couleurs ,intrépides barbaresques , humaines infanteries. Tout est ensemble, concerto des matières, des odeurs, du ventre de la putain, au suaire du défunt, de la rage obscène de nos gueuloirs à la crépitance de nos cierges, tout peut être infiniment dit. 
C'est une chose étrange, ...la Poésie. 
Fragile et tendre transparence de l'humain. 
La langue de Calaferte nous rassure, nous touche, nous enveloppe. 
On s'y sent amoureusement, véritablement bien. 
Nous en en avons tellement besoin.
Astrid Shriqui Garain, lecture



 Dans la nuit sur la route
 

Les autres étaient là.
Ils riaient en marchant dans la neige.
Filles et garçons enlacés.
Rien n'explique de quelle façon ils ont soudain pu disparaitre.
Se sont-ils évanouis ?
Sont-ils morts dans l'ombre ?
Se pourrait il que jamais ils n'eussent existé ?
Se pourrait-il que l'imagination seule les eut inventés ?
Que depuis le début ont ait été abandonné ?
Tout alors serait faux.
Peut être n'y a -t-il ni nuit ni route.
Peut être n'y a t il nulle maison où rentrer.
Peut être personne n'est il inquiet en attendant sur le pas de la porte.
Peut être vaudrait-il mieux se laisser tomber dans la neige et ne plus bouger.
Le ciel blanc.
Épais.
Le ciel de grosse laine rêche.
Des arbres
Des profondeurs noires
Des bruissements
La nuit.
Crier serait inutile
Tout est trop loin
Trop étouffé
Il fait froid
Le corps se raidit de froid.
Les genoux font mal.
Les mains cuisent dans les poches
Personne ne viendra
Personne ne saura
Quel mal
Quelle peur
Ce qu'il faudrait attendre est trop incertain
il suffirait d'une voix
Maintenant
D'un pas sur la route
D'une voix
Des bras qui vous portent
Qui étreignent
Une chaleur
Une odeur de tabac
Pleurer
Rassuré
Être bien
Vivant


 


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