Grisélidis Réal, écrivain, peintre, prostituée . 1929. 2005.
« Mon cher
Maurice,
Erika m'a téléphoné
hier et m'a dit qu'elle t'avait vu, elle était très
contente. Quant
à moi j'ai été reprise et engloutie par les
tourbillons où je
dois me débattre chaque nuit. Je mets tout mon
espoir, ma volonté
en ce 1er juillet prochain où je serai délivrée.
Vois tu Maurice,
tu n'as peut être pas compris vraiment ce que
c'est pour moi, tout
ça.
Loin d'être une
partie de plaisir, c'est bien plutôt une torture,
la démolition de
l'âme et du corps. »
Grisélidiss Réal,
mémoires de l'inachevé, extrait.
Sommes nous
prédisposés à vivre ce nous vivons ?
Pour quelle raison a t
elle connu l'enfer,
pour quelle raison a- t- elle fait naître une galaxie entière ?
D'où le vient cette
fulgurance, cette beauté primale, cette force,
cet instinct ?
Besoin d'amour,
urgence de liberté.
« Chaque
matin, à l'aube, quand je vais au lit, épuisée, il me
semble qu'un
troupeau de pourceaux m'a passé dessus, qu'ils m'ont
piétinée,
meurtrie, bavé dessus, craché sur mon visage, dans mes
yeux, mes
oreilles, ma bouche. C'est une sensation d'humiliation
et d'horreur,
qui me pousserait au-delà de la nausée jusqu'au
meurtre. Oui je
pourrais facilement, très facilement tuer si je me
laissais aller. »
Elle est de celles
qui sont blessées de longtemps.
De celles qui tranforment les larmes
en étoiles.
De celles qui sont heureuses comme des folles d'exister.
De celles qui
respirent de voir l'enfant jouer devant la fenêtre.
Qui sourient à
tous les soleils futurs.
De celles qui
écrivent
Des lettres comme pour faire des trous dans les murs.
Pour
respirer, pour crier, hurler, bercer, consoler, maudire,
voir et
parler, nous regarder et puis nous sourire.
Des adresses
d'amitié d'amour et de tendresse.
Putain et prisonnière et
peintre et poète, et écrivain.
Maitresse amante, et pleine mère
guerrière.
Quelques unes des oeuvres de Grisélidis Réal :
La prison. La
drogue. La faim. La peur. La traque. La trique.
La fuite…
Et quand on lit
cette correspondance ...quelle joie, quel bonheur !
Quel espoir toujours
réactivé.
Quelle confiance en la vie,
quel regard sur l'humanité.
Quelle innocence préservée.
Quelle combativité.
Ordre Moral, curé, armée, poulailler. Ils vont déguster.
Elle va leur jetter leur deux mille ans de contre vérité.
Elle reçoit des coups mais
elle sait en donner.
Comment a t elle
fait cela ?
sauver ce qui en nous est le plus précieux ?
comment a t elle
fait pour qu'ils ne
massacrent pas son innocence ?
Lucide oui.
Tourmentée blessée à jamais.
Naïve jamais.
Mais tellement
jeune dans ses élans.
Oui flamboyance.
Eclat, couleurs, vibrations,
mouvement.
La vie plein la
gueule, à pleine dents, à coups de crocs,
des momes plein les bras.
Mais lire, peindre
ecrire, aimer toujours, prendre soin.
Dire l'injustice, l'étroitesse des corps, la cruauté de nos vies,
mais sauvegarder la Beauté de la Vie, dire cette urgence.
J'ai pris le parti
de lire cette correspondance avant
tout autre lecture de
Grisélidis Real.
Je crois que
sa vie contient son œuvre.
Lettres, dessins, peintures, enfants,
lettres, amitié, passions,
musique, révoltes, tout est un chemin.
Un chemin, une route, qui mène
où bon il semblera à chacune et
chacun de la retrouver .
« Les palais
aux velours obscurs », « mort en sursis » et
« Lili »
sont des textes étonnants.
Grésilidis, la
tzigane, la gitane, la libre, la flamboyante.
« Oui moi
Moi l'enfant
Vous m'avez donc
volé ma peau
Lié mes mains
Scellé mon sexe
Vous m'avez dérobé
l'amant de mes huit ans et l'amante de mes
quatorze ans
Vous m'avez rendue
frigide suicidaire paranoïaque
et Putain
Je vous vomis papa
mama caca gaga
Le foute aux tombes
La Merde au coeur
La Mort au cul
et l'âme aux
chiens.
Qu'on m'exorcise moi
je veux tous les corps contre le mien
Bites bouches
couilles cul tripes con vagin langues doigts
Mimosa violettes
algues prunelles grenades
Orange amère mon
père ma mère ma sœur mon frère
Qu'on m'ouvre enfin
le ventre
Qu'on y foute
l'univers
Tant que nous
n'aurons pas éjaculé nos morts
La vie n'est pas
possible. »
Grisélidis Real....
c'est une flamme, un brasier, une étoile hurlante,
vibrante,
battante.
On a rarement lu
chose pareille dans le ciel
Et c'est un véritable bonheur que de vivre des
instants de lecture
comme celui là.
Lecture, Astrid Shriqui Garain
https://www.youtube.com/watch?v=EclDtIZexmY
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire