Tout est vision.
Vision du proche et du lointain, du dedans et du dehors, des cimes et
des abysses, du jour et de la nuit, du silence et du bruit, du monde
et de l'homme.
L'un est
scientifique , spécialiste de la biologie moléculaire,
l'autre est
écrivain, poète.
Tous deux être
humains, tous deux napolitains.
Amis, amis sur le
grand chemin.
Amitié donc entre
ces hommes et également avec une femme, Emiliana Borrelli
scientifique
également.
Et c'est dans le
cercle de cette amitié qu'ils correspondent.
© Eric Bourret, photographie
Comprendre le monde
c'est comprendre les hommes.
Serions nous le reflet de ce qui nous
dépasse ?
Ou ce qui nous surpasse est il la projection de
notre image ?
Pour penser ainsi,
imaginer tous les possibles il faut d'abord reconnaître à l'homme
sa nature d' être libre. Erasthothène, Copernic, Giordano Bruno
étaient « outside the box ».
« De temps en
temps, je passe un chiffon sous mon lit. J'y trouve la poussière
enroulée en boucles et en spirales, la figure parfaite des galaxies
vues au télescope. La coïncidence de formes entre l'immense et le
minuscule m'attire. Un amas d'étoiles reproduit celui d'un rouleau
de poussière. »
Infiniment grand, infiniment petit.
Deux mètres
d'ADN...une galaxie. Lorsque nos cellules se touchent combien de
mondes se tutoient ?
Vision des sciences,
vision poétique de nos espaces.
« L'ADN est
une prophétie. Elle est écrite , mais ne peut être appliquée ».
Par le choix, l'homme change le cours de son histoire
continuellement.
L'homme, cet instable fait nature.
Ce qui est écrit
dans l'ADN est donc d'une importance fondamentale, mais ce que les
cellules de notre corps utilisent pour lire la partition est
essentiel pour donner ce que les biologistes appellent « la
plasticité du génome ».
Notre ADN est comme
un moule qui prend diverses formes selon les étapes de notre
développement.
99.9 % de sa
matière nous est commune à tous. Mais chacun interprétera sa
lecture.
Histoire, émotions,
événements, accidents, joies et douleurs rencontrées donnent
« forme » à notre ADN.
« Ainsi, les
décisions sociales, politiques, affectives sont déterminées par
des convictions qui ne sont écrites dans l'ADN, mais qui sont
produites par la plasticité du génome. »
La plasticité du
génom nous offre « un vaste espace de liberté du
comportement ».
Infiniment grand ,
infiniment petit. Infiniment loin.
Hasard, probabilité,
inné, acquis, possible….
Combien de chances
pour que la vie apparaisse ? Qu'elle progresse ? …
Qu'elle subsiste ?...Qu'elle se développe ?
Rien n'est écrit
définitivement. Tout est en mouvement.
Expansion de
l'univers, expansion de la vie.
De toute vie.
L'homme réalise
qu'il n'est pas seul au monde. Tout concorde pour que la grande partition
du monde soit jouée. Du désert à la banquise , des profondeurs des
océans, du fond des plus épaisses forets. Tout Vie, tous
participent.
Interaction,
adéquation, A quel point que l'infra rejoint-il le supra ?
Nous sommes Capteur
de système solaire. Des structures moléculaires dans chaque cellule
reçoivent des signaux. La nuit le jour , nous recevons. Nos
cellules savent la nuit, savent le jour.
Notre rythme naturel
est basé sur un cycle.
« astronomie
et biologie « sont liées.
« En août,
couché sur le toit dune maison d'un île, j'ai senti sur moi le
poids de l’univers grand ouvert.Il pesait dans ma respiration, il
pénétrait par mon nez et mes yeux, il tournait dans mon corps de
mes cheveux à mes pieds. La nuit grande ouverte au-dessus de moi
envoyait sur la Terre une énergie, différente de celle du Soleil,
mais tout aussi forte.Mon corps fatigué d'avoir nagé, rassasié de
poisson, s'en abreuvait.Qu'est donc la nuit pour le corps ? »
La nuit ce silence
de lumière. Lumière composée de photons. Ces particules voyagent
à trois cent mille kilomètres par seconde. La lumière du Soleil
met 8 minutes pour arriver jusqu'à nous, pour les lointaines
galaxies cela se mesure en milliards d'années.
Lumière ET nuit .
Inséparables.
La Nuit ? Nous
dormons rêvons, nous courrons, nous combattons, nous fuyons, La
Nuit ? . Notre epiphyse , ce « troisième oeil à
l'inérieur de notre cerveau » , issu des mêmes cellules qui
donnèrent naissance également à notre rétine, travaille . La
Nuit ? Elle fabrique la mélatonine qui régie la grande
horloge de notre sommeil.
« Et la nuit
est immense. » Notre sommeil profond, nos rêves si hauts...
« J'aime le
temps qui est passé, bon s'il a été bon, mauvais parce qu'il ne
peut y revenir. »
Passé, futur
présent, ce n'est pas une question d'échelle mais de rayonnement,
de sprirales, de cycles,..une histoire ronde comme le monde.
Alors en lisant
cette correspondance entre Paolo Sassone-Corsi et Erri de Luca j'ai
pensé à Leopardi, au tendre Giacomo Leopardi.
« Toujours
j'aimai cette hauteur déserte
Et
cette haie qui du plus lointain horizon
Cache
au regard une telle étendue.
Mais
demeurant et contemplant j'invente
Des
espaces interminables au-delà, de surhumains
Silences
et une si profonde
Tranquillité
que pour un peu se troublerait
Le
coeur. Et percevant
Le
vent qui passe dans ces feuilles – ce silence
Infini,
je le vais comparant
A
cette voix, et me souviens de l'éternel,
Des
saisons qui sont mortes et de celle
Qui
vit encor, de sa rumeur. Ainsi
Dans
tant d'immensité ma pensée sombre,
Et
m'abîmer m'est doux en cette mer.
Giacomo
LEOPARDI, Canti.
«
Lune, que fais tu dans le ciel ? Dis le moi, que fais-tu, Lune
Silencieuse » ?…
Giacomo,
...le tendre et si malheureux poète.
Et
puis vision encore
« Pour
avancer je tourne sur moi-même
... »
....«
Mais au dedans , plus de frontières !».. Jean
TARDIEU.
Depuis
la nuit des temps, Passé et Avenir , Sciences et Poésie sont sœurs
humaines.
Lucrèce,
Gaston
Bachelard,
Léopardi,
Albert Jacquard,
André Brahic, De Lucca, Hubert Reeves, Sassone-Corsi,
….
il n'y a pas que du hasard, peut être n'y a t il, pour
commercer, que de très belles rencontres.
Paolo Sassone-Corsi, Emiliana Borrelli, Erri de Luca
La nébuleuse à double hélice observée par le télescope spatial Spitzer serait la conséquence d'une déformation du champ magnétique au voisinage du coeur de la Voie Lactée (Crédits : NASA/JPL-Caltech/UCLA)
Astrid Shriqui Garain, lecture 09.2016.
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