Il fait très beau
ce dernier mercredi de novembre. Ligne 4 ,... ligne 3 , un
accordéon souffle son petit air sur les toits,
Paris est
a le nez bleu et les lèvres qui tremblent un petit peu
mais la Seine
a toujours ses belles cernes d'émail bleu.
Mes pas m'entraînent
vers les arts et leurs métiers.
Dans la maison du pendule,
manivelles engrenages, soupapes , cadrans dorment dans les nuages.
J'ai rendez vous avec les machines à dessiner. Drôles de machines,
drôles de machins bidules et machins choses à croquer.
François Schuiten
dévoile un peu de sa table de travail.
Entre la maison des arts et
métiers et François Schuiten c'est l'histoire d'une fidèle amitié.
Et ce n'est pas un hasard si dans l'album « revoir Paris »,
ce musée trouve sa place.
Connaissez vous les
cités obscures ? Non, et bien quel dommage mais je vous sais
curieux par nature et intelligent par l'esprit et je sais d'ors et
déjà que vous vous préparez à cette grande aventure.
Car c'est une grande
aventure que de partir à la rencontre de l'univers de Schuiten et
de Peeters !
Prodigieuse même !
Ne cherchez pas la
porte d'embarquement, ne courez pas au guichet de DreamAirway, non…
ouvrez un livre, un livre de dessins, un livre d'histoires et de
dessins et au détour d'un passage .... entrez dans un musée !
Beaucoup connaissent
ces mondes. Certains n'en reviennent pas .
D'autres ont
fait le choix d'y vivre, et cela, pour toujours .
Ces mondes sont dans
une autre dimension. Une dimension inconnue de la Terre. Invisible si
vous préférez. Mais ces cités existent bien.
Et ce que je suis
allée voir ce matin c'est à la fois la feuille de toutes ces routes
et le carnet des nombreux voyages qu'elles offrent.
Poésie. Ces mondes
sont poétiques. Parce qu'ils sont rêves, magie, imaginaires,
fantaisie, beauté, voyages, ils sont surréalistes, fantastiques,
troublants, émouvants, inquiétants, parfois...effrayants. Ils sont
invention, intelligence, ils sont renversants, hallucinants. Ils sont
touchants. Ils sont si proches de nous. Ils nous ressemblent tellement…
ils nous ressemblent....
Pas comme deux coups
de crayons, non, comme des milliers de traits, d'encres, de plume, de
lavis, de couleur, de dessin préparatoire , d'esquissse, de
tecnhique, de lecture, de savoir.
Penché sur sa table
de travail, Schütten dessine et c'est une leçon de poésie qui vous
traverse l'âme.
J'ai compris
aujourd'hui une chose. C'est une journée de génie ! comme qui dirait une leçon de chose...
J'ai compris que bien longtemps je limitais la Poésie, je la
limitais à notre monde, j'ai compris que la Poésie n'est pas
domestique, n'est pas objet de compagnie.
J'ai compris qu'elle est un
fleuve d'air de pierre de bois d'eau de feu de chair de langue , de
terre, que c'est un fleuve qui traverse les mondes , qui parle de monde à
monde, que sa langue est multiple que la plupart de ses dimensions
nous sont inconnues.
Je viens de le
comprendre et ce sont toutes ces drôles de machines et toutes les
passions, et tous les rêves qui les ont crées qui m'ont permis de
comprendre cela.
Il faisait très
beau ce mercredi de novembre.
Je ne regrette qu'une chose. Il n'y
avait pas d'enfant ce matin à cette exposition. J'espère qu'ils
viendront. J'espère que les grands penseront à leur montrer ces
machines à voyager, à rêver, à transformer.
Puissiez vous passer
la mer des silences, traverser celle des adieux, plonger dans l'océan
neptunique.
Puissez vous voir
l'architecture de Xhystos, étudier les Quarx, traverser ces cités
du livre, là où dans chaque livre le remède à toute
maladie…
Que le continent
obscur vous conduise aux sciences, qu'il sème en vous toutes les
questions que les mondes puisent porter, que ses tours vous fassent
dresser le regard vers le ciel,
Puissiez vous trouver votre
Passage, que la preuve par neuf vous transporte, que votre imagination
vous porte.
Puissiez vous savoir
les nuits d'Alaxis, et les sept jours de Mylos.
Puissiez vous croire
au plus incroyable possible , à tout ce que suppose le vaste devenir des
humains.
Osez chaque jour imaginer.
« Le Musée
des arts et métiers présente, du 25 octobre 2016 au 26 février
2017, Machines à dessiner, une exposition exceptionnelle,
fruit d’une collaboration avec François Schuiten et Benoît
Peeters, auteurs des Cités obscures et de Revoir Paris.
Pivot de l’exposition, le dessin s’y dévoile comme une activité
à la fois technique et poétique, entre précision et imagination. »
François
Schuiten
François Schuiten est né à Bruxelles le 26 avril 1956, dans une
famille où l’architecture tient une grande place. À l’atelier
bande dessinée de l’Institut Saint-Luc, il rencontre Claude Renard
avec qui il réalise deux albums :
Aux médianes de Cymbiola
et
Le Rail. Avec son frère Luc, il élabore au fil des ans
le cycle des
Terres creuses. Depuis 1980, il travaille avec
Benoît Peeters à la série
Les Cités obscures ces albums
ont été traduits en une douzaine de langues et ont obtenu de
nombreux prix. Il a obtenu en 2002 le Grand prix d’Angoulême pour
l’ensemble de son œuvre. François Schuiten a également participé
à la conception visuelle de plusieurs films, dont
Taxandria
de Raoul Servais,
Mars et Avril de Martin Villeneuve mais
aussi
Mr Nobody de Jaco Van Dormael. Auteur de très
nombreuses réalisations scénographiques, dont la station de métro
Arts et Métiers, il fut le responsable du gigantesque pavillon
thématique
A Planet of visions qui accueillit cinq millions
de visiteurs à l’Exposition Universelle de Hanovre en l’an 2000,
ainsi que du pavillon belge à l’Exposition de Aïchi en 2005. Il
est le concepteur du
Train World de Bruxelles, qui remporte
un succès considérable depuis son ouverture à l’automne 2015.
Benoît Peeters
Benoît Peeters est né à Paris le 28 août 1956. Ancien élève
de Roland Barthes, il a publié de nombreux ouvrages, dans des genres
très divers. Il est l’auteur avec François Schuiten de la série,
couronnée en 2013 par le Grand prix manga au Japan Media Arts
Festival. Spécialiste d’Hergé, il a publié trois ouvrages qui
ont fait date,
Le Monde d'Hergé,
Hergé fils de Tintin
et
Lire Tintin, les bijoux ravis, ainsi que plusieurs essais
sur la bande dessinée, le storyboard, Hitchcock, Nadar, Paul Valéry,
etc. Il a collaboré avec le dessinateur Frédéric Boilet, la
photographe Marie-Françoise Plissart et le cinéaste Raoul Ruiz. Il
a aussi réalisé trois courts métrages, plusieurs documentaires et
un long métrage,
Le dernier plan. Commissaire de nombreuses
expositions, il s’est occupé avec François Schuiten de la
restauration et de l’aménagement scénographique de la Maison
Autrique, premier édifice Art Nouveau du grand architecte belge
Victor Horta. Il a publié la première biographie du philosophe
Jacques Derrida, ainsi que
Trois ans avec Jacques Derrida,
les carnets d’un biographe, et plus récemment
Valéry,
tenter de vivre.
Paris - 30.11.2016, Astrid Shriqui Garain