jeudi 4 août 2016

Ses lettres de joie






                            L' homme qui court, Paris
                                             1953 © Sabine Weiss


Allez va, la passion est triste mon aimée
triste,
triste et belle, 


belle à ne rien rejeter
triste à tout prendre,
sans leur vouloir rien voler. 


contre nous, contre ta joue, contre ma peau
entre mes mains, dans chaque paume de jeunesse
je crois à la tragédie, à ces choses fabuleuses de ces temps
qui nous échappent, et qui nous sont universels.
 

Ce monde est notre théâtre.
Ses clous sont les épines de son arbre.
J'aime les fruits de cet arbre.
Je veux savoir ces fruits en chacun de nous.
 

Je peux pleurer, être anéantie, oui anéantie,
n'être rien , ne ressembler à rien,
ne répondre à rien, ne rien pouvoir signifier
Je le peux, le pourrai
et c'est parce que je le sais que je le redoute
je veux y faire face dans le tumulte de mon émotion
c'est là que je vis là que je trouve la force de tenir
de me hisser d' hurler peut être et surtout
oh surtout sache le : de vivre
 

en trébuchant, déchirant, hésitant, malmenant, apprenant
mais toujours innocente
innocente dans la nudité d'un désir,
désirante comme au premier jour
voilà l'innocence que je revendique
que je garderai toujours
même si tout le reste de moi doit s'effacer.



Je crois au destin de cette énergie.
Et je refuse le hasard des obéissances. 



C'est une mémoire que je ne perdrai pas
Rien ne m'enlèvera cela. Même pas la Mort.
Elle est aveugle et sourde. Elle n'est rien.
Elle est froide. Elle ne sait rien. Ne donne rien.
Ne me touche pas .
Elle ne sait pas la Mort comment ici nous avons été capable de nous regarder.
Elle n'a pas le désir de le savoir.
 

 oui je crois à ce qui nous fais trembler, chavirer, palpiter,
ce qui nous broie, nous fend, nous ouvre
je crois aux pleurs des plaisirs, aux larmes des bonheurs
au battements de nos portes
aux balançoires de nos coeurs


sinon pourquoi donc être affamés à ce point 

de mots de couleurs de regards, de lumières ?

Pourquoi alors donnerai-je tant de confiance au silence ?
 

Pourquoi sursauter, se retourner, s'arrêter, penser, tenter, oser.
 

Voilà l'Art. L'Art est devant moi. Et c'est là toute notre capacité.
 

La passion est triste parce qu'elle peut s'achever mon aimée
mais elle est belle passagère et ce qu'elle me dit
oh et ce qu'elle me dit en me portant lumière
c'est que lorsque tu es devant moi
vois tu ...j'écris.
 

J'écris sous la lampe du premier jour
et reliant ses lettres de joie.
 

Allez, va ,
la passion nous suivra. 


Astrid Shriqui Garain ©



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