USA. North Carolina. Wilmington. 1950.
© Elliott Erwitt / Magnum Photos
Peut-être toi
en corps à
ce pavillon bleu,
le
squate d'un ange dans l'horizon
d'une
ville coupée en
deux
cet
arbre dans un arc floral
d'une
forêt à ce silence qui se balance
aussi
vitre
que
le vent pousse des papiers crasseux
c'est
un trousseau de clés qui fait noce
en
quatre pas de deux
des
mains qui font pinceaux à un carrefour en losange
un
train qui gueule son rail à la grille d'une horloge
qui
s'arrange un petit peu avec un soleil qui repose
la
terre
sur cinq lettres de feu
comme
une éponge sur la gueule des dieux
un
pigeon chiant comme une madone
un
hanneton en chemise
blanche
qui
donne des ailes au 105
Peut
être toi
cet
ours gris qui court comme on sourit
à
cet arrêt qu'on choisit pas
et
qui rend dingue
Peut
être toi, aujourd'hui et
demain
comme hier
ici,
avant ou plus bas
et
toutes les semaines
qui
ne sont pas prêtes à être les dernières
peut-être
toi
le
rêve de l'enfant dans la tête de ce cheval
sous
le pont des vitrines
cet
oiseau
qui renverse une cage et s'élance
comme un éclair
dans
le détroit d'une mer noire
peut
être toi
ces
mots qui tendent vers la foule
les
mains offertes
à ce jaune désert , dans un aéroport,
pour
cette orange amère,
peut-être toi
ce
navire si grand et trop rapide
qui
dépasse du champs, qui déborde du cadre
ou
cette lettre sur le banc,
cette
porte ouverte comme sur un port,
à
cette adresse qui s'efface,
à
cette enfant sur le sable
et
puis la ville qui porte une abeille
à
son rubis végétal
Peut
être toi en corps
ces
drapeaux-jours, cette lanterne d'or, ce bateau-mouche
le
cliquetis d'une pluie comme une liste de courses
une
phrase sans sa suite, un chien sans ses liens,
ce
vélo qui ferraille, un piano qu'on déballe, cette roue qui
s'emballe
peut-être
toi blotti
dans
son juillet de paille
au
prochain hiver qui refait à neuf sa pagaille
le
désordre des fleurs
ou
l' odeur de nos heures pour la sueur des livres
la
poésie sait peut être ça ?
peut
être toi, et rien que ça
toi
et tout à la fois
de
la pierre au jardin et de tes pas vers les miens
la
poésie sait quoi.
c'est
quoi ?
C'est
pour ça et comme le reste
La
poésie sait ce qu'on regarde
alors
demain peut être
en serai-je là.
Astrid Shriqui Garain, "peut -être toi" .
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